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Identité de genre »

Publié le 10 mai 2013 par le sénateur Grant Mitchell  

Le projet de loi C-279 est un projet de loi d’initiative parlementaire présenté par Randall Garrison, député néo-démocrate. Les projets de loi d’initiative parlementaire sont présentés par des députés qui ne sont pas membres du Cabinet. Je suis le responsable libéral du projet de loi C-279 au Sénat et je me réjouis de ce rôle.

L’une des plus grandes choses que j’aie faites en politique a été de défendre, en 2005, le projet de loi sur le mariage entre personnes du même sexe et de voter en faveur de ce projet de loi. Le même sentiment m’anime en ce qui concerne le projet de loi C-279. Ces deux projets de loi représentent le fondement même de notre engagement, en tant que Canadiens, à assurer l’égalité, l’acceptation, la diversité et le respect des droits de la personne.

Le projet de loi C-279 modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d’y intégrer la notion d’« identité sexuelle » et il modifie le Code criminel pour établir, à partir de cette notion, une catégorie de crime haineux. Il vise à protéger davantage les transgenres contre la discrimination, les abus et les agressions de nature sexuelle ou autre.

Les transgenres sont des personnes qui ont l’intime conviction d’avoir une identité sexuelle différente de celle qu’ils ont à la naissance. Des études révèlent que 60 % des transgenres ont cette conviction profonde avant l’âge de 10 ans et 90 % avant 19 ans. Ce n’est pas quelque chose qu’ils décident; après tout, pourquoi une personne s’exposerait-elle volontairement au ridicule, aux abus et à de violentes agressions sexuelles ou physiques, qui sont le lot quotidien des personnes transgenres? En outre, ces personnes ont de la difficulté à obtenir un emploi, un logement, un salaire décent et même des soins de santé. Elles sont continuellement victimes de harcèlement et de graves agressions physiques et sexuelles. Ce sont des amis, des collègues, des voisins et des membres de la famille.

Voici les arguments invoqués contre le projet de loi :

1. La définition de « transgenre » est subjective et elle repose sur des sentiments personnels profonds, qui ne peuvent être utilisés en droit. Au contraire, en droit, il est constamment question d’états d’esprit et de sentiments personnels subjectifs. La religion est protégée dans les deux textes de loi visés par le projet de loi C-279 et s’il est un sujet profondément subjectif et personnel, c’est bien la religion. Qui plus est, ce sont les croyances de la personne qui exerce de la discrimination qui sont en jeu ici et non pas celles de la personne qui la subit, et toutes les croyances qui incitent une personne à exercer de la discrimination envers une autre sont par définition fausses et ne peuvent donc être que subjectives. La loi tire les choses au clair, dans chaque cause de discrimination, ainsi qu’en droit pénal, où elle détermine l’état d’esprit, l’intention, y compris l’homicide involontaire par opposition à d’autres niveaux de meurtre et, plus généralement, l’accident ou la préméditation.

2. Certains soutiennent que des hommes vont s’habiller en femmes pour pénétrer dans la salle de toilettes des femmes et se serviront de la nouvelle loi comme moyen de défense. Ça n’est jamais arrivé dans les États américains où des dispositions comme celles-ci ont été adoptées. Par ailleurs, comment les femmes réagiraient-elles si une personne transgenre, femme à la naissance, mais ayant l’air d’un homme et agissant comme un homme, s’introduisait dans leur salle de toilettes? Qu’arriverait-il à une personne transgenre, homme à la naissance, mais s’habillant et se comportant en femme, si elle entrait dans la salle de toilettes des hommes?

Encore une fois, les tribunaux évaluent constamment le comportement et auraient tôt fait de démêler des arguments fallacieux fondés sur cette loi.

Les personnes transgenres ont extrêmement peur de la discrimination et des sévices; ce sont elles les victimes, pas les agresseurs.

3. Les personnes transgenres sont déjà protégées. Elles le sont jusqu’à un certain point, mais seulement avec la « déformation » des définitions contenues dans les lois dans leur forme actuelle. La Loi canadienne sur les droits de la personne, qui est une déclaration des valeurs canadiennes, donne plus de visibilité à la question et renseigne le public. Pourquoi ne pas vouloir augmenter la protection qu’elle offre et laisser savoir que nous appuyons les transgenres tout en renseignant le grand public?

4. Les transgenres peuvent être « soignés ». Nous avons entendu cet argument dans le cas de l’homosexualité, argument qui a été rejeté, bien entendu, avec force. Les transgenres ne sont pas plus malades que les hétérosexuels. Ils sont ce qu’ils sont.

Pourquoi ne pas expédier la question et adopter le projet de loi? Les Canadiens ont toujours fini par faire la bonne chose. Il a fallu 60 ans pour que les femmes obtiennent le droit de vote et à peu près autant d’années pour qu’elles soient considérées comme des « personnes » dans la Constitution. Il a fallu encore plus de temps pour que les Autochtones puissent voter. Et il a fallu presque 140 ans pour que le mariage entre personnes de même sexe soit approuvé. Mais nous avons fait toutes ces choses. Si nous nous hâtons d’adopter des mesures de protection pour les transgenres, ce qui arrivera inéluctablement parce que nous finissons toujours par faire les bonnes choses, nous épargnerons aux transgenres une certaine souffrance et certains sévices qu’autrement ils éprouveront.

Fait intéressant, le projet de loi a été adopté à la Chambre des communes grâce au soutien de 18 conservateurs, dont 4 étaient des membres du Cabinet (Flaherty, Baird, Raitt et Moore). Le premier ministre s’est prononcé contre le projet de loi, mais n’a pas fait pression auprès du whip pour qu’il assure la discipline de parti. On constate un appui important de la part de sénateurs conservateurs également.

Espérons que nous finirons par mettre aux voix le projet de loi et par l’adopter.



Cliquez ici pour lire mon discours à la deuxième lecture

Les collections autochtones aux institutions culturelles du Canada »

Publié le 25 avril 2013 par le sénateur Charlie Watt  

Je vous remercie de vos lettres au sujet des récents changements aux institutions culturelles du Canada. En tant que seul sénateur inuk du Canada, je sais que ces changements à Bibliothèque et Archives Canada, à Pacs Canada et au Musée des civilisations sont très préoccupants pour notre population autochtone. En tant que Canadien, je sais aussi que nous devons tous nous inscrire en faux contre la tentative pour limiter notre accès à notre patrimoine culturel commun. Je vous invite à appuyer ici pour lire la lettre que j’ai écrite à mes collègues libéraux au Sénat. Je continuerai à insister pour que nos institutions historiques et culturelles communes soient respectées.

 

Nakurmiik (merci en inuktitut),

 

Le sénateur Charlie Watt

Les conservateurs et l’équilibre budgétaire »

Publié le 19 mars 2013 par le sénateur Grant Mitchell  

J’ai été stupéfié en constatant que les conservateurs n’avaient pas équilibré un budget depuis 1896. Au Canada, les conservateurs n’ont pas été suffisamment longtemps au pouvoir pour établir de comparaison, mais aux États-Unis, les faits démontrent qu’en moyenne, sous les présidents républicains, les rendements des marchés boursiers ont été inférieurs de 17 points de pourcentage aux rendements obtenus sous les présidents démocrates. Pourquoi est-ce le cas? Et pourquoi devrait-on croire que la droite constitue le choix sensé pour la gestion d’un budget, sans parler de la gestion d’une économie? Je ne peux faire autrement que de me demander : « Où l’idéologie de droit a-t-elle déjà réussi à améliorer une société ou un pays? »

Je crois que ce gouvernement conservateur ne réussira jamais, au grand jamais à équilibrer le budget. Voici pourquoi :

1. Parce qu’ils détestent le gouvernement, les conservateurs ne le comprennent pas et n’écoutent pas les fonctionnaires, qui savent le gérer. L’atteinte de l’équilibre budgétaire n’est pas une opération de propagande politique; c’est une opération de gestion.

2. De nombreuses raisons expliquent le fait que l’économie se comporte mal sous les conservateurs, qui doivent composer avec des recettes fiscales réduites avant même d’avoir apporté des réductions fiscales pour des raisons idéologiques. Sous les gouvernements conservateurs, l’économie se comporte mal essentiellement parce que leur idéologie les pousse à commettre des erreurs fondamentales. Premièrement, ils croient que l’économie n’est qu’une affaire de chiffres, alors qu’elle est en fait une affaire de gens. Deuxièmement, les conservateurs, ce qui est assurément le cas de ceux qui sont en place actuellement, s’efforcent de faire peur aux gens. La peur est l’antithèse de l’optimisme et contrairement à la peur, l’optimisme stimule l’économie.

3. Ils s’inclinent devant le secteur privé, en oubliant que le secteur privé n’a pas bâti ce pays pour en faire un ensemble. Les gouvernements doivent jouer un rôle de chef de file pour inspirer la mobilisation collective et atteindre de grands objectifs. Aucun PDG n’a de plateforme ni de mandat pour cela.

4. Leur idéologie leur dicte d’acheter beaucoup de matériel militaire, que l’on ne peut vraiment pas se permettre dans certains cas (les F35).

Ne vous faites pas d’illusions, ils n’équilibreront pas le budget (jamais ils n’y arriveront).

En cette Journée internationale de la femme, parlons des femmes autochtones portées disparues ou assassinées »

Publié le 8 mars 2013 par la sénatrice Claudette Tardif  

Chaque année à l'occasion de la Journée internationale de la femme, je pense à ces femmes au Canada qui n’ont toujours pas la possibilité de se faire entendre en dépit des progrès réalisés par notre nation en ce qui a trait à l'égalité entre les sexes. Je pense aux centaines de femmes autochtones portées disparues ou assassinées, dont les histoires nous sont si rarement racontées, et dont la le sort tragique attire si peu d’attention publique.  

Je suis heureuse de constater que le thème choisi par le gouvernement du Canada pour la Journée de cette année est Travaillons ensemble : engager les hommes dans l’élimination de la violence faite aux femmes.

Les faits sont choquants. Les femmes autochtones du Canada sont cinq fois plus susceptibles que les autres femmes de mourir de mort violente, d'après une récente étude de Statistique Canada. La recherche montre qu'elles ont trois fois et demie plus de risques d'être victimes de violence et trois fois plus de risques d'être victimes de violence conjugale que les femmes non autochtones.

Entre 2000 et 2008, les femmes et les jeunes filles autochtones représentaient environ 10 p. 100 des cas de meurtre de femmes au Canada, même si elles ne forment qu'à peine 3 p. 100 de la population féminine du pays.

Ce qui est particulièrement tragique, c'est qu'il s'agit dans la plupart des cas de jeunes femmes et de jeunes filles. Plus de la moitié des victimes ont moins de 31 ans et 17 p. 100 sont des jeunes filles âgées de moins de 18 ans.

C'est avec beaucoup d'émotion que j'aborde ce sujet, tant parce que je suis une femme que parce que je représente l'Ouest. Nous savons que la majorité de ces cas se produisent dans les provinces de l'Ouest. Au total, 16 p. 100 des plus de 600 femmes autochtones disparues et assassinées venaient de ma province, l'Alberta. Seule la Colombie-Britannique a un taux supérieur, avec 28 p. 100 des cas.

Les sénateurs auront noté que j'ai parlé de plus de 600 femmes, sans donner un chiffre exact. Le fait que le nombre exact est inconnu illustre le caractère honteux de cette crise nationale. Nous n'avons même pas été en mesure de quantifier le problème. Nous savons que des femmes disparaissent et sont assassinées par centaines, mais nous n'avons aucune idée du nombre exact.

Il est plus que temps de s'attaquer à ce problème.

Les efforts de membres déterminés de la collectivité,  dans tout le pays, sont une source d'inspiration. Cependant, la mobilisation des collectivités pour sensibiliser la population et combattre les stéréotypes ne sont qu'un élément de la solution. Il faut que le gouvernement s'associe à ces efforts si nous voulons avoir le moindre espoir de combattre sérieusement cette crise.

Nous avons besoin d'une enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées, afin de trouver des solutions globales pratiques. 

En cette Journée internationale de la femme – et chaque journée – je veux voir cette tragédie continue retenir l’attention du public.


L'optimisme »

Publié le 5 mars 2013 par le sénateur Grant Mitchell  

En cette époque d’idéologie de droite, on a perdu de vue les trois éléments fondamentaux d’une société forte, d’une économie robuste et d’un pays vigoureux.

D’abord, l’économie ne concerne pas seulement l’argent et les chiffres. Il y a bien plus : les gens.

Ensuite, l’économie est forte lorsque la population est optimiste.

Enfin, le Canada n’est pas le pays qu’il est parce que le secteur privé l’a construit à lui tout seul. Par le passé, un gouvernement solide était un gouvernement qui fournissait leadership pour concilier des intérêts conflictuels, inspiration pour parvenir à la réalisation d’objectifs communs fondés sur des valeurs collectives, soutiens en matière de politique sociale équilibrée pour donner à la population la confiance nécessaire pour prendre des risques et intervention économique mesurée pour stimuler la croissance économique et l’emploi.

Or, l’idéologie de droite se fonde sur des principes contradictoires qui vont à l’encontre de ces trois constats. Voici ces principes :

Premièrement, selon l’idéologie conservatrice, l’économie se limite plus ou moins aux flux monétaires (capitaux), aux impôts (toujours plus faibles) et aux coûts (toujours plus bas quel qu’en soit le coût), ce ne sont là que des chiffres.

Deuxièmement, dans l’idéologie conservatrice, il y a toujours des craintes, ce qui est à l’opposé d’un milieu propice à l’optimisme. Elle décrit un monde dangereux, où la criminalité ne cesse d’augmenter et est menaçante (en fait, elle recule, et nous pouvons faire appel à nos connaissances en psychologie et en sciences sociales pour la faire reculer encore plus vite); le terrorisme menace notre existence et nos valeurs (en fait, il n’y a quasiment aucune guerre entre États, et le monde est statistiquement plus sûr qu’il ne l’était il y a 30 ans); les écologistes veulent détruire nos emplois (en fait, la prise en compte de l’environnement et la lutte contre le changement climatique sauveront notre économie et créeront d’énormes débouchés).

À l’opposé, voir le monde comme un vase à moitié plein et non à moitié vide et s’inspirer de ces craintes peut être la source d’un optimisme inspiré. Nous pouvons créer une société où la criminalité est moindre, où chacun se sent en sécurité et où l’on sauve des vies avant qu’elles ne soient détruites par la criminalité; il y a beaucoup à faire pour assurer la paix mondiale, mais l’on progresse vers un monde plus sûr; la protection de l’environnement (la lutte contre le changement climatique, surtout) est le moteur de la vigueur économique, et non son ennemie.

Troisièmement, un gouvernement qui hait le gouvernement n’a qu’un seul objectif, réduire l’appareil gouvernemental. Bien sûr, il importe d’avoir un gouvernement plus efficient. Mais ce n’est là qu’un des multiples moyens d’atteindre les véritables objectifs d’un gouvernement performant, de faire du Canada un meilleur pays et d’améliorer la qualité de vie des Canadiens. Tout PDG vous dira que, si vous établissez le mauvais objectif, vous n’irez pas où vous désirez vous rendre. Nous avons besoin d’un leadership national — celui du premier ministre — pour établir des stratégies dans les domaines, entre autres, de l’énergie, du changement climatique, des soins de santé et de la santé publique, des Autochtones et des garderies.

Il n’y pas de leadership national actuellement sur ces questions et bien d’autres, car l’idéologie de droite exècre le gouvernement et collaborer avec les provinces est perçu comme une ingérence du gouvernement. Aussi difficile que cela puisse paraître, notre premier ministre ne rencontre pas les premiers ministres des provinces pour rallier les ressources, chercher des gains d’efficience dans la prestation de service, résoudre des problèmes communs et établir des priorités nationales. C’est comme si le PDG d’une grande entreprise n’appelait jamais ses vice-présidents pour parler de problèmes, établir des objectifs et orienter ses ressources.

Ce manque de leadership national est surtout manifeste dans le dossier de l’énergie et du changement climatique. Après sept années au pouvoir, le premier ministre n’est toujours pas capable de bâtir un pipeline dans un Canada riche en énergie. Comment une entreprise ou un premier ministre provincial peut-il réunir tous les intérêts conflictuels propres à des projets ayant l’ampleur, l’importance et la complexité nationales des grands projets énergétiques sans l’appui du gouvernement fédéral?

La façon dont le premier ministre a défendu le projet Keystone XL en disant qu’il s’imposait de manière toute naturelle pourrait bien être révélatrice du manque de réflexion apporté à sa stratégie en la matière. Toutes les positions anti-environnementales du gouvernement ne font qu’envoyer à la Colombie-Britannique et aux États-Unis le message que le Canada n’est pas suffisamment engagé en matière de lutte contre le changement climatique, entre autres dossiers environnementaux, pour obtenir l’approbation du public pour mener à bien ces projets.

Le gouvernement conservateur est quasiment absent de tout autre message. Et, même si une entreprise est extrêmement crédible, elle peut difficilement combattre les rumeurs négatives émanant du gouvernement fédéral. Imaginez ce qui se passera lorsque le ministre des Ressources naturelles, dont la responsabilité est de bâtir notre crédibilité en matière environnementale, notamment aux États-Unis, se fera rappeler à Washington qu’il a refusé d’accepter officiellement les fondements scientifiques du changement climatique lorsqu’on lui a demandé de le faire en Chambre.

Imaginez plutôt ce qu’il adviendrait s’il y avait une collaboration, pilotée à l’échelle nationale, entre premiers ministres provinciaux et appuyée par des consultations avec les différents secteurs, les Premières Nations et les chefs d’ONG et le public en général. Imaginez un premier ministre qui pourrait inspirer, au lieu d’épouvanter; un premier ministre ayant la force de poursuivre des objectifs propres à bâtir une nation forte. Ce Canada pourrait être motivé pour se concentrer sur trois éléments critiques d’un avenir prospère : autonomie énergétique, un niveau d’instruction de calibre mondial (qui respecterait les sciences et la recherche) et la certitude en matière d’approvisionnement en eau, le tout s’appuyant sur une démocratie stable, des systèmes de transport et de communications solides et un système de soins de santé publique national.

Rajoutez un gouvernement et un premier ministre qui comprend que le gouvernement a pour fonction de rallier la population (alors qu’un PDG d’entreprise n’a tout simplement pas le programme), et le Canada pourrait de nouveau mener le monde.

Nakurmiik »

Publié le 1 mars 2013 par le sénateur Charlie Watt  

Je tiens à remercier mes collègues du Sénat pour le travail qu’ils ont accompli relativement au projet de loi S-207I, Loi modifiant la Loi d’interprétation. 

Hier, le projet de loi a été adopté à l’étape de l’étude en comité par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, et je suis très heureux de l’excellent travail de mes collègues les sénateurs et de leur esprit de coopération.

J’aimerais également remercier les conseillers juridiques et les leaders autochtones qui ont pris part au processus de rédaction. Merci aussi aux témoins qui ont comparu devant le Comité.

Alors que le projet de loi entame maintenant l’étape de la troisième lecture et qu’il se rendra, je l’espère, à la Chambre des communes, j’ai hâte d’établir un dialogue avec les représentants élus et j’espère que nous pourrons conserver cette approche de collaboration étroite tout au long des discussions sur l’utilisation des dispositions de non-dérogation et la nécessité d’emprunter un langage clair dans les lois fédérales.

Nakurmiik (« merci » en inuktitut)


Chapitre 3 — Répercussions de la cyberintimidation »

Publié le 25 février 2013 par la sénatrice Mobina Jaffer  

Le troisième chapitre du récent rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, intitulé La cyberintimidation, ça blesse! Respect des droits à l’ère numérique, explique que « l’intimidation et la cyberintimidation ont des effets dévastateurs sur le bien-être de nos enfants et nuisent à leur développement et à leur capacité de prendre leur place dans la société ».

(Pour lire le rapport ou les guides d’accompagnement pour les parents et pour les jeunes, veuillez visiter le site web du Comité.)

Voici quelques points saillants du chapitre :

  • Les recherches révèlent que les répercussions immédiates et à plus ou moins long terme de l’intimidation n’affectent «  pas seulement les victimes, mais aussi les intimidateurs et les observateurs ».

    o   Comme il a été mentionné dans le chapitre 2, la cyberintimidation étant très propice aux « changements de rôles », il est plus utile de discuter de la cyberintimidation comme étant un comportement.  

  • « [L]es jeunes qui ont comparu devant le comité confirme[nt] que les troubles engendrés par la cyberintimidation sont potentiellement plus dommageables [que ceux causés par l’intimidation traditionnelle] et justifient largement que l’on y porte une attention particulière. » (p. 47)

  • Les jeunes Autochtones sont particulièrement vulnérables à la cyberintimidation en raison « de nombreux facteurs, comme le racisme, les conditions de vie, la vulnérabilité économique et la colonisation ». (p. 47)

    o   « Il est impératif d’appuyer la recherche afin de mieux comprendre l’impact de ces phénomènes sur les jeunes Autochtones et d’y répondre efficacement. » (p. 48)

  • « [L]a discrimination à l’école peu[t] se diriger tout particulièrement vers les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres ou en questionnement (LGBTQ) ou qui sont perçues comme telles. » (p. 48)

    o   Dans les écoles où des gestes ont été posés pour favoriser des cultures ouvertes à la diversité, notamment « l’instauration de politiques anti-homophobie et anti-transphobie, la formation d’alliances entre homosexuels et hétérosexuels ou encore l’intégration de la diversité sexuelle dans l’enseignement et dans la discussion sur l’intolérance », « les élèves ont fait savoir que le climat s’était amélioré ». (p. 49)

  • La cyberintimidation a une incidence négative sur la réussite scolaire des jeunes et porte atteinte à leur droit à l’éducation.

  • La cyberintimidation a aussi un effet nocif sur la santé des jeunes, effets qui se traduisent par des symptômes physiques, psychologiques et émotionnels.

  • Selon Suzanne McLeod, préparatrice de programmes d’études au Centre for Suicide Prevention, le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les adolescents canadiens de 15 à 19 ans. Plusieurs témoins ont dit au Comité qu’il est important de ne pas « considérer la cyberintimidation ou l’intimidation traditionnelle comme l’unique cause du suicide d’un jeune » (p. 48). Toutefois, nous reconnaissons également « qu’il y a de grands besoins à combler en matière de recherche afin de mieux comprendre les liens entre la cyberintimidation et le suicide » (p. 49).

  • La professeure Shelley Hymel a déclaré au Comité :

    « [L]es écoles sont l’endroit où il est le plus rentable de s’attaquer au problème d’intimidation. Plusieurs études ont par exemple montré l’existence de liens entre l’intimidation chez les enfants et la délinquance et les comportements criminels plus tard au cours de leur vie. Il faut penser en même temps aux travaux de recherche menés par un économiste du nom de Cohen en 1998, qi a déterminé qu’un jeune à risque élevé qui quitte l’école et choisit la criminalité coûte à la société de 1,3 à 1,5 million de dollars au cours de sa vie. Selon les estimations, nous dépensons plus de 9 milliards de dollars par année au Canada pour régler les problèmes liés à la violence relationnelle. J’ose affirmer que le coût de la prévention dans nos écoles et par la recherche serait beaucoup moins élevé que le coût qu’entraînent les conséquences. »

  • « [L]es témoins s’entendent pour dire qu’il est impératif de faire de l’intimidation une priorité à l’école afin de réduire la violence et la criminalité et de permettre aux jeunes de développer leur plein potentiel et de prendre leur place dans la société. » (p. 50)

Économie et environnement »

Publié le 20 février 2013 par le sénateur Grant Mitchell  

Les économies dominantes de demain seront celles qui verront les défis environnementaux non pas comme des contraintes onéreuses, mais comme une occasion de se dépasser.

Depuis très longtemps, on nous répète qu’il y a des coûts à s’occuper des enjeux environnementaux et que ces coûts nuisent à notre compétitivité. Or, les gens comprennent de plus en plus qu’économie et environnement sont comme les deux côtés de la même médaille, c’est-à-dire que l’un ne va pas vraiment sans l’autre.

Les risques – économiques, mais pas seulement – qui sont associés aux enjeux environnementaux, notamment aux changements climatiques, sont pour ainsi dire infinis. Et ceux qui croient que l’on va nuire à l’emploi en se préoccupant trop d’environnement auraient avantage à se rappeler le nombre d’emplois qui ont été perdus précisément parce qu’on ne s’en est pas suffisamment préoccupé. Les forêts canadiennes ont été affaiblies par le dendroctone du pin, dont la propagation n’est freinée que par les longues périodes de temps froid, phénomène que nous n’avons pas connu depuis longtemps. Quant au rendement des pêches canadiennes, il ne se situe plus qu’à 40 % de ce qu’il était il y a quelques années à peine, les poissons subissant les effets des changements climatiques sur leur habitat.

À cause des changements climatiques, les orages sont de plus en plus violents, et les dommages qui en résultent sont énormes. Les sécheresses et les inondations, de leur côté, nuisent à l’industrie agricole. Combien a pu coûter l’ouragan Sandy, qui a frappé New York? Combien d’emplois ont été perdus à cause de lui? Les assureurs estiment à 170 milliards de dollars les coûts qui peuvent être attribués annuellement, de par le monde, à la violence sans cesse croissante des tempêtes. C’est quatre fois plus qu’il y a quelques dizaines d’années à peine.

Au contraire, on peut stimuler la productivité et la créativité de l’économie du XXIe siècle en s’attaquant aux changements climatiques. Il suffit de songer aux emplois qui seraient créés si on mettait l’accent sur le développement de l’énergie renouvelable et sur la réhabilitation thermique des bâtiments. Et que dire de la diversification économique qui en résulterait, ou du dynamisme qui animerait le pays tout entier et son économie, s’il fallait que ceux qui nous dirigent se relèvent les manches et s’attaquent à ces défis. Avec des investissements relativement peu élevés de la part du gouvernement, l’Ontario a réussi à mettre sur pied une véritable industrie solaire, laquelle vaut aujourd’hui 42 milliards de dollars. Nous ne devrions pas sous-estimer l’importance économique du secteur du tourisme et des activités de plein-air. Or, pour que ces deux industries fonctionnent à plein, il faut que l’environnement se porte à merveille.

Paradoxalement, c’est dans la lutte aux changements climatiques et autres enjeux environnementaux que se trouve sans doute le seul moyen de soutenir l’économie traditionnelle reposant sur les hydrocarbures. Le Canada vend la totalité de son pétrole et de son gaz aux États-Unis; or, ces derniers atteindront probablement l’autosuffisance d’ici 10 ou 15 ans. Qui plus est, tant que le Canada se limitera au marché nord-américain, il perdra jusqu’à 35 $ du baril par rapport à ce qu’il pourrait obtenir ailleurs dans le monde. Nous aurions donc tout intérêt à diversifier nos marchés.

Nous sommes entrés dans une nouvelle ère. Les retards qu’accusent les projets Gateway et Keystone montrent que, de nos jours, si nous voulons assurer l’avenir de ce secteur essentiel à la bonne marche de notre économie, il faut que les projets d’exploitation du pétrole et du gaz et la commercialisation des produits qui en sont traditionnellement tirés obtiennent l’assentiment du public. Pour ce faire, nous devons prouver que nous entendons nous attaquer sérieusement aux changements climatiques ainsi qu’aux problèmes environnementaux qui y sont associés.

Heureusement, tout n’est pas noir. Le président Obama a parlé, dans son discours inaugural, des effets dévastateurs des changements climatiques. Le maire Bloomberg, de New York, a même appuyé Obama lors des dernières élections parce que ce dernier a conclu que l’ouragan Sandy avait été causé par les changements climatiques. Et selon la présidente du Fonds monétaire international, les changements climatiques constituent le plus important défi économique du XXIe siècle. Ces appels à l’action ne viennent pas de n’importe qui.

De nombreux dirigeants de l’industrie pétrolière et gazière sont d’avis qu’une taxe sur le carbone constituerait le meilleur moyen de leur fournir un certain sentiment de certitude, de centrer l’action économique sur la réduction des émissions et d’envoyer un message on ne peut plus clair au public pour qu’il donne son assentiment. De plus en plus, on voit que les politiciens canadiens comprennent que l’environnement, l’assentiment social et la survie de l’industrie pétrolière et gazière sont inextricablement liés.

Bien qu’on ne manque pas de raisons de respecter et de préserver l’environnement, l’importance de celui-ci pour l’économie constitue probablement la plus probante de toutes. Or, on ne menacera pas l’économie en comprenant cet état de fait et en agissant en conséquence; au contraire, on favorisera ainsi l’émergence d’une économie durable et concurrentielle qui fera l’envie du reste du monde.


Chapitre 2 – Portrait de la cyberintimidation »

Publié le 22 janvier 2013 par la sénatrice Mobina Jaffer  

Le deuxième chapitre du récent rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, La Cyberintimidation, ça blesse! Respect des droits à l'ère numérique, dresse un portrait de la cyberintimidation. On y cite les témoignages de témoins entendus concernant la définition du phénomène et le contexte où il se produit.

(Pour lire le rapport ou les guides d’accompagnement pour les parents et pour les jeunes, veuillez visiter le site web du Comité.)

Voici quelques points saillants de ce chapitre :

  • Il n’existe pas de définition universelle de la cyberintimidation, qu’on appelle parfois intimidation électronique, intimidation en ligne ou harcèlement en ligne. Les élèves, les enseignants et les chercheurs ont dégagé quatre grands éléments constitutifs de la cyberintimidation :

  • L’utilisation d’appareils électroniques

    o   Une forme d’intimidation

    o   Un comportement destiné à blesser

    o   Une forte probabilité ou une crainte de répétition

  • De nombreux témoins « ont discuté de l’importance d’appuyer le développement d’une définition de la cyberintimidation et d’un vocabulaire uniforme et constant afin d’intervenir de façon plus efficace auprès des jeunes » (9).

  • « La cyberintimidation est une violence qui revêt plusieurs formes  et qui se déploie dans une multitude d’environnements, y compris Internet, les sites de réseautage, les textos, le « sexting » et la messagerie instantanée » (12).

  • Il existe passablement de recoupements entre la cyberintimidation et l’intimidation traditionnelle. Les deux sont « l’expression de comportements agressifs qui ont généralement pour objet une affirmation de pouvoir » (15).

  • L’intervention par les pairs est extrêmement importante. Une étude a révélé « que l’intimidation cesse dans un délai de 10 secondes dans près de 60 % des cas lorsque des pairs interviennent » (16).

  • Les témoins ont décrit au Comité comment la cyberintimidation :

    o   Est nettement plus intrusive et difficile à éviter

    o   A un auditoire presque illimité

    o   Découle de la fausse impression qu’on peut dire n’importe quoi en ligne ou dans les messages textes

    o   Laisse les jeunes intimidateurs faire des commentaires sous le couvert de l’anonymat

    o   Entraîne très souvent un inversement des rôles

    §  Un enseignant, Bill Belsey, « a comparé l’intimidation et la cyberintimidation à une pièce de théâtre » (23).

    o    Se caractérise par un phénomène de répétition bien spécifique et très néfaste

  • « On manque cruellement d’information [quant aux] facteurs de risque précurseurs qui annoncent qu’un enfant pourra être intimidateur ou intimidé » (28).

  • Les jeunes « qui appartiennent à des groupes minoritaires ou qui sont perçus comme différents sont particulièrement vulnérables à l’intimidation » (28).

    o   « L’homophobie, le racisme, le sexisme et d’autres formes de marginalisation  sont présents dans les actes de cyberintimidation », a indiqué la professeure Faye Mishna.

  • Il est difficile de mesurer l’ampleur du problème en raison des écarts observés dans les travaux de recherche et de la tendance chez les jeunes à ne pas signaler les incidents d’intimidation.

  • Les jeunes Canadiens « sont de grands consommateurs de nouvelles technologies …99 % d’entre eux ont accès à Internet à la maison, à l’école ou par l’entremise de leur téléphone cellulaire… plus de la moitié des jeunes Canadiens utilisent Internet plus d’une heure par jour, principalement pour établir des liens et communiquer avec leurs pairs… les jeunes écrivent en moyenne de 50 à 60 messages textes par jour… certains jeunes échangeraient quotidiennement plus d’une centaine de messages textes » (37).

  • La technologie est un outil : elle peut servir à apprendre et à aider, ou encore à blesser et à faire du mal.

  • « Si l’aisance avec laquelle les jeunes manipulent les technologies est incontestable, il ne faut pas présumer que les jeunes possèdent toutes les connaissances pour naviguer de façon sécuritaire dans le cyberespace » (39).


Le Comité sénatorial des droits de la personne : rapport sur la cyberintimidation »

Publié le 17 janvier 2013 par la sénatrice Mobina Jaffer  

En décembre dernier, le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a déposé son rapport intitulé La cyberintimidation, ça blesse! Respect des droits à l’ère numérique. Notre comité a également déposé deux guides : un à l’intention des jeunes et un à l’intention des parents.

En novembre 2011, le Sénat a autorisé le Comité à examiner la question de la cyberintimidation au Canada en ce qui concerne les obligations internationales du Canada en matière de droit de la personne aux termes de l'article 19 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et d’en faire rapport. En vertu de l’article 19, les États ont l’obligation de prendre toutes les mesures appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence physique et mentale, ce qui comprend la cyberintimidation.

En tant que sénateurs, nous avons exploré la cyberintimidation au moyen d’une approche fondée sur les droits de la personne, qui repose sur trois principes :

  1. Les droits sont universels et identiques pour tous.
  2. Les enfants sont le sujet de leurs propres droits (plutôt que l’objet); il faut leur donner les moyens d’agir et de promouvoir leurs propres droits.
  3. Les États ont l’obligation de garantir les droits de la personne.

Notre rapport explore un problème qui touche des jeunes partout au Canada. Selon la plupart des études réalisées sur la question, le taux de cyberintimidation chez les jeunes oscille entre dix et trente-cinq pour cent. La  cyberintimidation est donc un problème croissant qui nous rappelle que les nouvelles technologies, pleines de promesses, viennent également avec une responsabilité : veiller à la sûreté et à la sécurité des jeunes qui utilisent Internet pour s’informer, communiquer et explorer le monde.

Notre comité a déterminé que l’ensemble de la communauté doit jouer un rôle pour prévenir la cyberintimidation et régler les problèmes qui en découlent. Au chapitre 7, nous présentons six recommandations qui appuient la participation de différents intervenants de la communauté pour contribuer à l’utilisation sécuritaire d’Internet, promouvoir de saines relations et encourager, dans les écoles, une culture de l’inclusion.

Au cours des prochaines semaines, je présenterai plus en détail les résultats des six chapitres suivants :

  1. Portrait de la cyberintimidation
  2. Répercussions de la cyberintimidation
  3. Adopter une approche fondée sur les droits de la personne pour contrer la cyberintimidation
  4. Rôles et responsabilités des intervenants
  5. Élaborer des pratiques exemplaires et perfectionner les programmes
  6. Recommandations et observations du Comité

 


Le sénateur Laurier LaPierre »

Publié le 11 janvier 2013 par la sénatrice Mobina Jaffer  

Aujourd’hui, j’aimerais rendre hommage à l’ancien sénateur Laurier LaPierre, décédé en décembre à l’âge de 83 ans.

Le sénateur LaPierre a acquis une notoriété nationale grâce à This Hour Has Seven Days, une émission hebdomadaire de nouvelles et d’actualités diffusée à CBC de 1964 à 1966.  

Il est bien connu que la passion et les émotions qu’exprimait le sénateur LaPierre en public indisposaient certaines personnes. Sa compassion a toutefois eu une incidence positive sur beaucoup de gens; le sénateur comprenait leur réalité et dans bien des cas, il s’identifiait à eux, comme en a témoigné sa réaction lors d’une entrevue avec Stephen Truscott, l’adolescent de 14 ans qui avait été condamné à une peine d’emprisonnement à perpétuité pour le meurtre d’une fillette en Ontario, ce qui a ravivé le débat sur la peine de mort. Malheureusement, CBC a jugé que le sénateur LaPierre avait manqué de professionnalisme en montrant son émotion (il avait versé une larme devant la caméra), et peu de temps après l’entrevue avec M. Truscott, le contrat du sénateur LaPierre a été résilié.

Patrick Watson, coanimateur de l’émission This Hour Has Seven Days, a déclaré que c’est en compagnie du sénateur LaPierre qu’il a passé certains de ses meilleurs moments devant la caméra.

Pour ma part, pendant longtemps, j’ai admiré de loin le sénateur LaPierre, et j’ai été absolument ravi quand nous avons tous deux été nommés au Sénat par le premier ministre Chrétien en 2001.   

Il était mon voisin de pupitre. Alors que nous apprenions l’un et l’autre le Règlement du Sénat, le sénateur LaPierre m’a informé très rapidement que certaines dispositions devaient être respectées, tandis que d’autres devaient être contestées. Il s’est toujours conformé à l’esprit général des dispositions du Règlement… mais pas nécessairement à l’intention particulière de chacune.

En tant que sénateur, il a été un ardent défenseur des droits de la personne, et plus particulièrement de ceux des Autochtones, des gais et des lesbiennes. Il s’est également exprimé avec passion sur des questions touchant le bilinguisme.  

Le sénateur LaPierre a été un voisin de pupitre très divertissant qui avait un excellent sens de l’humour. Il a déjà invoqué le Règlement au sujet des appareils BlackBerry; le fait que j’utilise constamment mon BlackBerry l’irritait profondément. Il avait l’habitude d’exprimer haut et fort ses opinions. Nous savons tous qu’il incarnait bien des choses, mais la timidité n’était pas un trait de sa personnalité. Il prenait toujours la parole alors que d’autres choisissait de se taire. Le 22 octobre 2002, il a déclaré :

Honorable sénateurs, c’est avec une certaine tristesse que je prends la parole pour déplorer une situation, dans cette enceinte, qui est discriminatoire envers certains sinon beaucoup d’entre nous qui n’ont pas les doigts très agiles. De nombreux membres de cet auguste groupe se servent de ce petit appareil appelé « BlackBerry »,  « blueberry », « raspberry » ou je ne sais trop quoi et obtiennent toute l’information dont ils ont besoin. Ceux d’entre nous qui souffrent d’arthrite aux mains ne peuvent pas se servir de ce genre d’appareil. Il s’ensuit que nous faisons l’objet de discrimination parce que nous ne pouvons pas apporter nos ordinateurs dans la salle. Les ordinateurs qu’utilisent les journalistes du Parlement et le sénateur Gauthier ne font aucun bruit. La plupart des ordinateurs modernes sur la planète ne font pas de bruit.

Le temps est venu pour Son Honneur de nous sortir du XIIe siècle et de nous faire entrer dans le XXIe siècle en nous permettant d’utiliser des ordinateurs portatifs dans cette enceinte, comme cela se fait dans toutes les assemblées législatives civilisées sur cette planète.

Le partenaire du sénateur LaPierre, Harvey Slack, a toujours été plein de sollicitude pour ses amis et lui.

Harvey, je pleure avec vous la perte d’un être humain remarquable qui se souciait réellement de l’unité du Canada et du bien-être des Canadiens.


Une stratégie nationale en matière d’énergie »

Publié le 19 décembre 2012 par le sénateur Grant Mitchell  

Il est urgent que le Canada se dote d’une stratégie nationale en matière d’énergie. Voici un aperçu de ce à quoi cela pourrait ressembler.

Notre pays fait face à d’énormes défis environnementaux et énergétiques. D’abord, les États-Unis constituent le seul marché d’exportation de gaz et de pétrole du Canada. Il faut savoir que les États-Unis risquent fort probablement de devenir autosuffisants en la matière au cours des 5 à 10 ou 20 prochaines années. Nous avons également besoin de nous doter de pipelines afin de pouvoir jouir de marchés internationaux diversifiés.

Ensuite, le changement climatique constitue un problème très grave et réel. Les risques liés au changement climatique sont infinis. Parlez-en donc avec les habitants de la ville de New York, avec les gens qui travaillaient auparavant dans les pêcheries de la côte Est et Ouest du Canada, ou encore avec les habitants du Nord. Ces gens vous feront part de l’augmentation inexpliquée des sécheresses et inondations qui touchent notre économie agricole.

L’histoire du Canada nous a montré que des défis de cette taille ne seront pas résolus si les 10 provinces et 3 territoires travaillent en silo et que le secteur privé continue à travailler sans certitude. Nous avons un besoin criant de créer une stratégie nationale énergétique (ainsi qu’une stratégie pour lutter contre le changement climatique). Nous avons besoin d’un leadership national pour ce faire. Il faut remplacer le vide dans lequel on se trouve. Le premier ministre Harper manque tout simplement à l’appel.

Afin d’établir une stratégie énergétique nationale, un véritable leadership ferait la promotion de la compréhension des réalités économiques suivantes :

1.  Les propositions Gateway et Keystone XL nous ont enseigné que des projets d’une telle envergure n’auront jamais lieu à moins qu’ils n’obtiennent l’aval social pour le faire. Ils n’obtiendront pas ce permis social à moins que nous ne puissions faire preuve d’une véritable crédibilité en matière d’environnement et, plus particulièrement, dans le dossier du changement climatique. Nous devons prouver que nous avons accompli de véritables progrès en matière de réduction des gaz à effet de serre. On ne peut plus tout simplement livrer de beaux discours.

2.  S’occuper du changement climatique ne nuira pas à l’économie. Souhaitez-vous faire souffrir notre économie? Alors il nous suffit de continuer à faire ce que nous faisons et faire fi du changement climatique. Le Canada a restructuré notre économie afin de remporter la Deuxième Guerre mondiale et cela n’a pas nuit à l’économie. Au contraire, cela a permis de faire démarrer une économie industrialisée occidentale très puissante qui, au cours des 60 dernières années, nous a permis d’afficher un des plus hauts niveaux de vie dans le monde.

3.  Ce n’est pas parce que l’énergie renouvelable n’est pas rentable aujourd’hui qu’elle ne le sera pas demain. Il y a quelques années, les sables bitumineux produisaient un baril de pétrole pour 25 $ et le vendaient pour seulement 10 $. Cela n’était certainement pas rentable, mais les choses ont fini par s’arranger. Pourquoi? Parce qu’ils avaient une vision qui leur permettait d’établir que, grâce à des économies d’échelle, à un développement des technologies et à des changements dans le marché et dans les prix, les sables bitumineux deviendraient une force motrice dans notre économie. Pourquoi est-ce que les conservateurs sont aussi réticents quand il s’agit d’appliquer ce raisonnement à l’énergie renouvelable?

4.  L’obsession idéologique qui s’oppose à un partenariat entre le gouvernement et le secteur privé est tout simplement stupide. De nouveau, les sables bitumineux ont pu démarrer car le gouvernement fédéral est devenu actionnaire en achetant 12 % dans les actions de Syncrude. Pourquoi est-ce que le gouvernement est aussi réticent à l’idée de participer à cet effort d’énergie renouvelable/alternative alors que les sables bitumineux, à leurs débuts, étaient, eux aussi, une forme d’énergie alternative.

Quels éléments devraient être compris dans une stratégie énergétique nationale? Le premier ministre devrait rencontrer les premiers ministres provinciaux et territoriaux et il faudrait y avoir une discussion nationale structurée sur ces enjeux. Une stratégie énergétique nationale devrait comprendre :

1. Un prix pour le carbone. Le Comité sénatorial de l’énergie et de l’environnement (dont je suis le vice-président) a entendu 250 témoins au cours des 3 années où il a étudié la stratégie énergétique nationale. Même les témoins en provenance de l’industrie ont comparu devant le comité pour demander que l’on établisse un prix pour le carbone. Aucun d’entre eux n’a demandé à ce que l’on établisse des règlements. La réglementation fixe les prix pour le carbone d’une manière très onéreuse et peut facilement être manipulée par un gouvernement qui ne veut pas vraiment s’occuper des émissions de gaz à effet de serre et du changement climatique.

2. Un engagement ferme et résolu pour le développement des énergies renouvelables. L’énergie renouvelable mènera à une création d’emplois, à des investissements, à des nouveaux marchés, des innovations technologiques, de la créativité et à une réduction des émissions de GES.

3. Réhabilitation du réseau électrique et un effort concerté pour le rendre plus « intelligent ». Cela est essentiel afin que l’on utilise l’électricité de manière efficace et que l’on développe l’énergie solaire.

4. Mettre l’accent sur l’autosuffisance énergétique. Imaginez à quel point le fait d’investir au Canada mènerait à des avantages économiques pour les entreprises canadiennes et générerait un intérêt international à faire affaire au Canada.

5. Que l’on envisage sérieusement de créer un pipeline qui relierait l’Est et l’Ouest. C’est curieux de voir que Harper trouve que le projet de Keystone est tout à fait logique car notre pétrole « éthique et sécuritaire » devrait remplacer le pétrole non éthique et non sécuritaire que les Américains achètent de sources douteuses. Eh bien, où donc est-ce que M. Harper croit que les Maritimes et le Québec achètent leur pétrole? Pourquoi ne fait-il rien pour régler ce problème? Pourquoi ne fait-il pas preuve de leadership sur cette question? M. Oliver dit que les conservateurs ne subventionneraient jamais un pipeline. Eh bien, pourquoi pensent-ils donc qu’il faille seulement parler de subventions : il s’agit peut-être plutôt de parler de leadership.

6. Il faut mettre l’accent sur la distribution énergétique en tant que moyen pour appuyer les collectivités rurales et les agriculteurs. Les énergies éoliennes, solaires, marémotrices, hydroélectriques et de la biomasse, sont, en grande partie, rurales. Elles fournissent des emplois à des petites collectivités d’une manière que les grandes centrales au charbon ne peuvent tout simplement pas faire.

7. Arrêter d’attaquer les groupes environnementaux. Il faut au contraire les accueillir favorablement. Il faut répéter que les conseils des groupes écologiques nous permettent de créer une meilleure stratégie énergétique et d’obtenir le permis social nécessaire pour l’élaborer. Accueillons favorablement l’environnement. Songez à l’approche de l’industrie forestière dans les années 1990 lorsqu’elle faisait face aux mêmes problèmes que l’industrie énergétique connaît à l’heure actuelle.

8. Mettons l’accent sur le captage et le stockage du carbone. Il est essentiel que nous perfectionnions cette technologie. Le monde en a besoin et nous pouvons le vendre au monde entier.

9. Élaborer une stratégie nationale de travail pour appuyer les industries qui produisent de l’énergie renouvelable et traditionnelle.

10. Coordonner les initiatives de recherche et de développement au pays afin d’appuyer l’énergie et les technologies de conservation qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre.

11. Comprendre que chaque solution au changement climatique sera critiquée par quelqu’un, qu’il s’agisse de l’industrie ou d’un groupe environnemental. L’on vous dira, par exemple, que le captage et le stockage du carbone est trop cher, que l’énergie nucléaire est trop dangereuse, que l’énergie éolienne rend les gens malades, que l’énergie solaire n’est pas rentable, ou encore que l’énergie hydroélectrique détruit l’habitat. Nous ne pouvons tout simplement pas attendre à ce qu’il y ait une solution parfaite. Le temps presse et nous devons agir maintenant.

Conclusion :

Si je vous semble un peu frustré, c’est parce que je le suis. Il y a d’énormes défis à relever mais également de véritables occasions à saisir. Si nous le faisons correctement, nous allons créer un niveau sans précédent d’inspiration, de créativité et d’entrepreneuriat qui créera un XXIe siècle remarquable, fondé sur une économie durable et qui fera l’envie du reste du monde. Nous avons tout simplement besoin de leadership pour y parvenir. Ce genre de leadership est tout simplement étranger aux conservateurs.


Un choix éclairé d’objectifs »

Publié le 13 décembre 2012 par le sénateur Grant Mitchell  

Ce soir, alors que j’écoutais au Sénat le débat sur le projet de loi omnibus C-45, je me suis mis à me poser certaines questions au sujet du gouvernement conservateur. Et je me suis demandé s’il n’y avait pas une constante dans la réponse à ces questions.

1. Pourquoi le gouvernement conservateur ne fait-il montre d’aucun leadership sur le plan national?

Le gouvernement n’a aucune stratégie nationale en matière d’économie, aucune stratégie nationale en matière de soins de santé, aucune stratégie nationale de prévention du suicide ni aucune stratégie nationale relative aux changements climatiques. Le premier ministre ne réunit jamais les premiers ministres des provinces et des territoires pour discuter de ces questions et de diverses autres questions qui exigeraient un leadership national.

2. Pourquoi les conservateurs méprisent-ils autant la démocratie?

La plus récente manifestation de mépris à l’égard de la démocratie est la présentation d’un autre projet de loi omnibus, mais les autres manifestations abondent : recours à la prorogation à mauvais escient, absence de rapports clairs sur les coûts des F35, utilisation à outrance du huis clos pour les séances des comités, refus presque total de modifier les mesures législatives du gouvernement, et une foule d’autres exemples de failles dans la reddition de comptes.

3. Pourquoi les conservateurs n’arrivent-ils pas à équilibrer le budget?

4. Pourquoi abandonnent-ils les Canadiens?

Pourquoi s’en prennent-ils aux environnementalistes? Pourquoi refusent-ils de faire témoigner des personnes atteintes de sclérose en plaques devant le comité sénatorial qui étudie les nouveaux traitements de cette maladie? Pourquoi reprochent-ils aux organismes de bienfaisance de participer aux débats sur les questions d’intérêt public?

La réponse est simple : parce que le gouvernement conservateur s’est concentré sur un objectif erroné, un objectif qui le distrait de l’objectif qu’il aurait dû normalement se fixer. Le gouvernement conservateur axe tous ses efforts sur la réduction de l’appareil gouvernemental au lieu de chercher à améliorer le Canada et la vie des Canadiens.

Un bon leadership repose, entre autres, sur un choix éclairé d’objectifs et sur la mobilisation des efforts pour les atteindre. Si les objectifs choisis ne sont pas les bons, les résultats obtenus ne pourront pas être satisfaisants.

Ce gouvernement conservateur de droite est mû par une idéologie anti-gouvernement. Certes, la réduction de l’appareil gouvernemental dans le but d’en arriver à un gouvernement plus efficace peut profiter au Canada et aux Canadiens. Cependant, même si un gouvernement plus efficace sera en mesure de mieux gouverner, ce n’est pas automatiquement le cas.

Qu’a fait cette idéologie de droite pour améliorer la société? Rien du tout.

Puisque le gouvernement conservateur n’a pas fixé d’objectifs adéquats susceptibles d’améliorer le pays, la constante qui ressort de la réponse à toutes ces questions est la suivante : 

1. Il n’y a pas de véritable leadership national parce que le leadership national étendrait la portée de l’action du gouvernement.

2. Il y a mépris de la démocratie parce que le processus parlementaire qui défend, définit et soutient la démocratie fait partie intégrante du gouvernement.

3. Les conservateurs semblent incapables d’équilibrer le budget : le fait qu’ils haïssent tant le rôle du gouvernement montre qu’ils n’y comprennent rien, qu’ils ne savent pas le gérer et qu’ils font la sourde oreille aux fonctionnaires qui pourraient beaucoup les aider en ce sens.

4. Les conservateurs abandonnent les Canadiens qui s’attendent à être protégés et défendus par le gouvernement.


L’approche fondée sur les droits appliquée à l’étude des droits des enfants et autres personnes »

Publié le 10 décembre 2012 par la sénatrice Mobina Jaffer  

Chaque individu à des droits, et les États ont l’obligation de protéger les droits de tous leurs citoyens, y compris les personnes les plus marginalisées, vulnérables ou à risque.

La Convention relative aux droits de l’enfant définit clairement les droits des enfants et énonce le principe selon lequel dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l'intérêt supérieur de l'enfant est une considération primordiale.

En 2007, le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a appuyé l’adoption d’une approche fondée sur les droits en ce qui concerne les enfants dans son rapport intitulé Les enfants : des citoyens sans voix - Mise en œuvre efficace des obligations internationales du Canada relatives aux droits des enfants.

Ce rapport reprenait les propos de Suzanne Williams, de l’International Institute for Child Rights and Development, qui expliquait en quoi cette approche peut changer notre vision des choses :

Si 100 enfants ont besoin d’être vaccinés, l’approche fondée sur les besoins ou sur les problèmes dirait, après que 70 enfants ont été vaccinés, que nous avons eu un excellent taux de succès de 70 %. L’approche fondée sur les droits reconnaît qu’il y a encore 30 enfants qui ont besoin d’être vaccinés. L’approche fondée sur les droits s’applique même aux enfants les plus marginalisés et fait une différence dans la vie de tous les enfants.

Ainsi, en appliquant une approche fondée sur les droits, on pourrait se demander pourquoi les 30 enfants n’ont pas été vaccinés. Est-ce parce qu’il s’agissait d’enfants à risque ou vulnérables? Faisaient-ils l’objet de discrimination fondée sur le sexe, l’orientation sexuelle, la religion, la race ou l’origine ethnique? Appliquer une approche fondée sur les droits implique d’assumer la responsabilité de ces 30  enfants et de déterminer ce qui les a empêchés de participer pleinement au programme d’immunisation ou autres programmes publics.

Le but d’une approche fondée sur les droits est d’aider les individus à faire valoir leurs droits et les États à s’acquitter de leurs obligations en matière de droits de la personne.

Le Comité des droits de la personne a arrêté trois grands principes pour une approche fondée sur les droits :

  1. Tous les droits sont égaux et universels;

  2. Les personnes sont le sujet de leurs propres droits et elles participent au développement au lieu d’être des objets de charité;

  3. Le cadre fondé sur les droits impose aux États l’obligation de travailler à la mise en œuvre de tous les droits.

Comme l’a déclaré l’ancienne présidente d’Irlande et Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mary Robinson, l’approche fondée sur les droits implique d’« expliquer une situation non pas à partir des besoins de la personne ou des secteurs de développement, mais plutôt de l’obligation de respecter les droits individuels. Cela pousse les individus à réclamer la justice en tant que droit, et non en tant qu’objet de charité. » [traduction]

En raison de la vulnérabilité des enfants, il est très important d’appliquer une approche fondée sur les droits sur les questions qui touchent les enfants et les adolescents. On s’assure ainsi qu’ils ne sont pas exclus du bénéfice de la loi, des politiques, des programmes et autres, mais n’en subissent pas non plus les conséquences négatives. Les enfants sont des personnes à part entière et ont, eux aussi, des droits. L’approche fondée sur les droits exige donc de les faire intervenir dans les affaires qui les touchent. Si on les appuie dans l’apprentissage de leur rôle en tant que détenteurs de droits,  on leur donnera le pouvoir de jouer un rôle actif au sein d’une société juste et libre.

Les enfants ne naissent pas cyberintimidateurs »

Publié le 23 novembre 2012 par la sénatrice Mobina Jaffer  

Les enfants ne naissent pas cyberintimidateurs. Ce sont des enfants : ils sont uniques, mais méritent tous autant les uns que les autres le bonheur, l’amour et la compréhension que garantit la Convention relative aux droits de l’enfant.

Comme je l’ai écrit dans ma plus récente contribution, qui portait sur la promotion de cultures inclusives, les valeurs comme le respect, la gentillesse et la compassion sont enseignées, apprises et vécues.

Il s’ensuit que la question du développement des enfants est au cœur de la cyberintimidation. Comme l’a souligné au Comité des droits de la personne Christian Whaelan, défenseur des enfants et de la jeunesse par intérim pour le Bureau de l’Ombudsman du Nouveau-Brunswick :

Si nous voulons régler le problème de l’éclatement des relations respectueuses et responsables en ce qui concerne les enfants, il faut aussi tenir compte des premiers stades du développement de l’enfant et de la façon dont nous pouvons donner aux nourrissons et aux enfants d’âge préscolaire le soutien dont ils ont besoin pour devenir des enfants et des adultes animés par la compassion. Notre expérience de travail, à notre bureau, avec des jeunes ayant des besoins complexes me fait dire que nous devons faire plus comme société, au Canada, pour renforcer le rôle de parent, et ce, très tôt dans la vie de l’enfant.

Autrement dit, le développement du jeune enfant est crucial. Il est à la base du développement des compétences sociales jusqu’à la fin du niveau primaire et au niveau secondaire, époque où la cyberintimidation atteint son paroxysme.

On a la fausse impression que les enfants qui ont acquis les compétences nécessaires pour intimider les autres ont aussi la maturité requise pour rationaliser leur comportement. Ce n’est pas le cas, a témoigné le professeur Shelley Hymel, du Département de psychologie de l’éducation et de l’orientation de l’Université de la Colombie-Britannique :

Il y a trois aspects de leur personne qui ne sont pas suffisamment développés.

1. Les enfants tendent à entrer à cet âge dans une période de développement de l’identité où ils essaient de trouver qui ils sont et quel est leur rôle au sein du groupe. Il y en a qui découvrent l’intimidation dans ce processus et constatent que cela est un moyen efficace.

2.On sait que c’est à cette époque du développement que le lobe frontal du cerveau, soit la partie de celui-ci qui assure les fonctions exécutives et collige l’information pour nous permettre de prendre la meilleure décision possible, subit une période de développement rapide qui se poursuit jusqu’à la mi-vingtaine.

3. La plupart des enfants sont considérés comme étant à ce moment-là à l’étape préconventionnelle du développement moral, ils voient surtout ce qu’une situation peut leur rapporter. Ce n’est pas qu’ils soient immoraux. Nos recherches montrent plutôt que les enfants ne font que commencer à comprendre à ce moment-là que la société est un système social dans lequel nous devons collaborer et nous entraider.

Les études que le professeur Hymel a menées montrent que « les enfants qui se livrent à l’intimidation, y compris à l’intimidation électronique, sont beaucoup plus susceptibles que les autres de se désengager moralement dans leur réflexion au sujet de leur propre comportement. Ils le justifient et le rationalisent en minimisant leurs responsabilités quant aux conséquences en tant que telles. Il y a aussi une corrélation entre ce désengagement moral et le comportement de spectateurs passifs. »

La référence du professeur Hymel à un « comportement de spectateurs passifs » était intéressante étant donné que Hal Roberts, vice-président de Stop a Bully, avait abordé cette question quand il avait comparu devant notre comité un mois plus tôt. Dans son exposé, M. Roberts a parlé de la « fluidité entre les rôles », notant que les enfants souvent « ne se rendent pas compte qu’ils peuvent créer un incident et que la fois suivante, ils vont l’observer et en parler à d’autres. À un moment donné, ils peuvent être victimes [de cyberintimidation] ». Je parlerai davantage de ce thème dans ma prochaine contribution, qui portera sur les étiquettes et les rôles : intimidateur, victime et spectateur.

Du point de vue des droits de la personne, les témoignages montrent la nécessité de se doter d’une politique et de ressources qui permettraient aux enfants, grâce au soutien de leurs parents et de leurs instituteurs, d’acquérir des compétences pour agir, réagir et réfléchir à leur comportement et à ses conséquences. En effet, même s’il n’y a pas deux enfants qui se développent de la même manière, tous les enfants ont cependant des droits égaux et universels : notre comité a confirmé ce principe en adoptant sa propre approche des études politiques fondée sur les droits. Dans les témoignages, on définit également les enfants comme des sujets (des acteurs, et non pas des objets) que les parents, les enseignants et les communautés doivent éduquer et responsabiliser. C’est le deuxième principe de l’approche fondée sur les droits adoptée par notre comité.

Le troisième principe, c’est que les États ont l’obligation de veiller au respect des droits. L’article 19 de la Convention relative aux droits de l’enfant fait obligation à toutes les Parties contractantes de prendre « toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation. » Les enfants ont le droit d’être heureux, d’apprendre en toute sécurité et de devenir des citoyens généreux qui savent faire preuve de commisération, et ce, avec l’appui d’adultes aimants. La meilleure façon de prévenir la cyberintimidation est de se concentrer sur ces droits, car les enfants ne naissent pas cyberintimidateurs. Ils naissent avec une capacité d’aimer illimitée. Nous n’avons qu’à leur en donner la chance.

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