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L’étude sur les défis liés à l’accès aux écoles françaises et aux programmes d’immersion française de la Colombie-Britannique

L’étude sur les défis liés à l’accès aux écoles françaises et aux programmes d’immersion française de la Colombie-Britannique

L’étude sur les défis liés à l’accès aux écoles françaises et aux programmes d’immersion française de la Colombie-Britannique

L’étude sur les défis liés à l’accès aux écoles françaises et aux programmes d’immersion française de la Colombie-Britannique


Publié le 13 juin 2017
Hansard et déclarations par l’hon. Mobina Jaffer

L’honorable Mobina S. B. Jaffer :

Honorables sénateurs, le Comité sénatorial permanent des langues officielles a effectué une étude intitulée Horizon 2018 : Vers un appui renforcé à l’apprentissage du français en Colombie-Britannique, concernant les défis auxquels font face les élèves et les parents pour accéder à des écoles françaises, ainsi qu’à des programmes d’immersion française en Colombie-Britannique.

Avant tout, j’aimerais remercier la sénatrice Tardif, présidente du Comité sénatorial permanent des langues officielles, ainsi que tous les sénateurs du comité qui ont contribué à effectuer cette étude en Colombie-Britannique.

Je remercie également les témoins qui ont participé à l’étude qui a mené à ce rapport. Merci d’avoir mis en lumière les enjeux de la francophonie dans ma province de la Colombie-Britannique : vos témoignages nous ont été indispensables.

Les sénatrices Tardif et Gagné ont présenté le rapport avec beaucoup de discernement et de clarté lors de leur discours respectif. Elles ont souligné les recommandations du rapport face aux enjeux de la francophonie et elles encouragent une collaboration entre la ministre du Patrimoine canadien et le ministère de l’Éducation de la Colombie-Britannique. Cette collaboration entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial est essentielle pour veiller à offrir une éducation francophone et un programme d’immersion qui puissent être accessibles aux élèves.

Non seulement notre nation croit au bilinguisme, mais il s’agit d’un droit énoncé dans la Charte canadienne des droits et libertés comme suit, et je cite :

Le droit reconnu aux citoyens canadiens […] de faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la langue de la minorité francophone ou anglophone d’une province :

a) s’exerce partout dans la province où le nombre des enfants des citoyens qui ont ce droit est suffisant pour justifier à leur endroit la prestation, sur les fonds publics, de l’instruction dans la langue de la minorité;

b) comprend, lorsque le nombre de ces enfants le justifie, le droit de les faire instruire dans des établissements d’enseignement […]

Ce droit permet donc à un parent francophone de ma province, où la langue française est en minorité, d’avoir accès à une éducation en français pour ses enfants.

Honorables sénateurs, je suis impatiente de travailler avec le nouveau ou la nouvelle commissaire aux langues officielles afin d’assurer la mise en œuvre et le respect de ce droit en Colombie- Britannique. Je voudrais remercier le commissaire sortant, M. Graham Fraser, du travail qu’il a fait pour les Canadiens.

Lors de cette étude, plusieurs statistiques frappantes ont été mentionnées; entre 2006 et 2011, la population francophone de la Colombie-Britannique a connu une croissance, et l’usage du français, comme langue première, a augmenté pour plus de 12 400 individus.

Malgré l’excellente étude et le travail de recherche effectué par le Comité sénatorial permanent des langues officielles, ainsi que les recommandations et les progrès à venir, je demeure mécontente. Ma frustration a trait au manque de considération et de reconnaissance dont nous faisons preuve à l’égard des communautés francophones non originaires du Canada, ainsi qu’au peu de financement accordé à l’éducation en immersion française.

Tout d’abord, le rapport nous montre que plus de 185 000 immigrants se sont installés dans ma province de la Colombie- Britannique entre 2006 et 2011. Environ 30 p. 100 de la population francophone de la Colombie-Britannique est d’origine immigrante. Cela signifie que ceux dont la langue maternelle n’est pas nécessairement le français, mais qui ont une connaissance de cette langue sont de plus en plus nombreux à s’identifier à la francophonie et à démontrer une appartenance à la culture francophone canadienne.

J’aimerais vous parler d’une francophone qui n’est pas d’origine canadienne. Benula Larsen est originaire de l’Île Maurice. Le français est l’une des premières langues qu’elle a apprises, avec le créole. À l’école secondaire, elle s’est liée d’amitié avec des camarades d’origine iranienne et québécoise. Ensemble, ils ont créé le Conseil jeunesse francophone de la Colombie-Britannique, qui existe encore aujourd’hui, dont la mission est de promouvoir la fierté de la francophonie auprès des jeunes.

Mme Larsen m’a dit ce qui suit :

La francophonie, et mon amour pour cette langue ont fait de moi la personne que je suis aujourd’hui. Je suis fière d’être enseignante en immersion française. J’habite cette province depuis 35 ans, c’est mon chez-moi.

C’est grâce à la langue française que je me suis si bien intégrée ici. Malgré tout, il nous reste beaucoup de travail à faire pour que nos élèves accèdent à une éducation en français. Certains immigrants ne sont pas informés à leur arrivée au pays qu’une éducation en français est possible.

Honorables sénateurs, il y a de nombreux francophones comme Mme Larsen dans ma province. Ma grande amie Padminee Chundunsing est également d’origine mauricienne. Elle est présidente de la Fédération des francophones de la Colombie- Britannique. Mme Larsen et Mme Chundunsing sont très impliquées et contribuent sans cesse à la culture francophone dans l’Ouest canadien.

Des francophones comme elles forment 30 p. 100 de la population francophone de ma province, c’est-à-dire des gens qui s’identifient à la langue française, sans être d’origine canadienne. Ce pourcentage de la population francophone reçoit très peu de distinction.

Dans le rapport du Comité des langues officielles, la 12e recommandation demande à la ministre du Patrimoine canadien, au ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, ainsi qu’au ministère de l’Éducation de la Colombie-Britannique de faire en sorte que les immigrants francophones soient informés de la possibilité d’accéder à une éducation en français en Colombie- Britannique.

Le deuxième défi concerne le peu d’accessibilité aux programmes d’immersion française. Il y a eu une augmentation de 75 p. 100 des inscriptions dans les écoles francophones entre 1997 et 2014, et une hausse de 65 p. 100 au sein des programmes d’immersion lors de la même période. Ces statistiques, tirées du rapport, le prouvent. Il n’y a aucun doute : la demande et l’intérêt sont là.

Malgré la forte demande et les longues listes d’attente pour les programmes d’immersion française, la Commission scolaire de Vancouver réduit de près d’un tiers ses classes pour la rentrée scolaire en septembre 2017. Cette différence est très considérable. Je comprends que l’éducation peut sembler être un problème provincial. Néanmoins, selon moi, le bilinguisme est une affaire nationale.

Mes deux enfants sont parfaitement bilingues. Ils veulent transmettre cet héritage linguistique à leurs enfants. Mon petit-fils était sur la liste d’attente de 13 écoles primaires en immersion. C’est grâce à ma belle-fille, Shaleena, qui a appelé ses contacts personnels, que mon petit-fils a enfin une place dans une salle de classe en immersion. De nombreux parents déploient des efforts et espèrent que leurs enfants soient acceptés en immersion. Empêcher les enfants d’accéder à une éducation en français est inacceptable. Cela nuit à la croissance et à l’épanouissement du bilinguisme canadien dans ma province. Le financement n’augmente pas au même rythme que les inscriptions.

La 11e recommandation du rapport s’adresse à la ministre du Patrimoine canadien afin que, de concert avec le ministère de l’Éducation de la Colombie-Britannique, on puisse répondre à l’intérêt grandissant à l’égard des programmes d’immersion en garantissant leur accessibilité et un financement nécessaire pour soutenir ces initiatives. Permettre aux parents et aux élèves d’accéder à une éducation en français et à des programmes d’immersion, c’est leur accorder un droit linguistique fondamental, comme le prévoit la Chartre canadienne des droits et libertés.

À titre de parlementaires, de politiciens et de représentants du gouvernement fédéral, nous avons le devoir de promouvoir l’éducation en français et en anglais, et ce, partout au Canada. Nous devons offrir aux élèves une éducation en français, nécessaire à leur identité culturelle. Depuis plusieurs décennies, ces problèmes se répètent d’année en année. Ils ne se régleront pas seuls.

Dans le cadre de la renégociation par le gouvernement fédéral du Protocole d’entente relatif à l’enseignement dans la langue de la minorité et à l’enseignement de la langue seconde en 2018, le rapport du Comité des langues officielles arrive à point. C’est le moment propice pour les gouvernements fédéral et provinciaux de montrer que la cause du bilinguisme leur tient à cœur en Colombie- Britannique et partout au pays.

De plus, dans le cadre de la négociation du nouveau Protocole d’entente en éducation et du prochain Plan pluriannuel des langues officielles, je demande à la ministre du Patrimoine canadien de joindre sa voix aux communautés francophones de la Colombie- Britannique, et de donner un coup de pouce au financement de l’éducation en immersion. L’appui financier est urgent et l’accessibilité est toute aussi importante.

Si nous n’offrons pas les ressources nécessaires ni l’accessibilité aux enfants pour l’apprentissage du français en Colombie- Britannique, nous ne serons jamais réellement une nation bilingue. Je suis une fervente militante des droits des minorités linguistiques en Colombie-Britannique.

Que ce soit pour les francophones et les francophiles comme moi, je crois sincèrement au bilinguisme. C’est ainsi que je demande au gouvernement de reconnaître les 30 p. 100 de francophones d’origine non canadienne, qui contribuent sans relâche à la richesse de la francophonie de ma province. Si nous prenons réellement au sérieux le bilinguisme, nous devons fournir les ressources nécessaires aux programmes d’immersion française.

Honorables sénateurs, le bilinguisme de l’anglais et du français est ce qui rend notre nation unique. Le bilinguisme est à la base de notre identité canadienne. Le bilinguisme est l’héritage le plus riche que nous pouvons offrir aux générations à venir. Ne pas encourager l’éducation francophone et l’immersion, c’est nuire à cet héritage culturel.

Nous sommes une nation bilingue, et nous nous devons de promouvoir cette richesse. Honorables sénateurs, un Canada anglophone, un Canada francophone et un Canada bilingue et uni sont vraiment nécessaires.

Honorables sénateurs, je crois sincèrement que si nous voulons sérieusement faire de notre pays un pays bilingue, qu’il demeure un pays bilingue, nous devons fournir sérieusement des ressources aux provinces.

Les ressources fournies aux enfants en Colombie-Britannique sont très mauvaises. Voilà pourquoi je suis heureuse et fière de faire partie du Sénat qui, grâce à l’initiative de la sénatrice Tardif, se penche sur la question. Je sais qu’elle surveillera continuellement la situation de sorte que les enfants de Terre-Neuve, du Québec et de la Colombie-Britannique parlent tous nos deux langues, le français et l’anglais.