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Évasion fiscale à l’étranger : l’équité ne peut provenir que de la Loi sur l’équité pour les contribuables canadiens

Évasion fiscale à l’étranger : l’équité ne peut provenir que de la Loi sur l’équité pour les contribuables canadiens

Évasion fiscale à l’étranger : l’équité ne peut provenir que de la Loi sur l’équité pour les contribuables canadiens


Publié le 19 mai 2015
Publication @fr par l’hon. Percy Downe

Nous sommes en période de compressions budgétaires, chaque dollar compte et de nombreux Canadiens ont souffert des effets des nombreuses réductions imposées aux programmes gouvernementaux.

Pourtant, saviez-vous que des milliards de dollars en actifs imposables sont cachés illégalement par des Canadiens dans des paradis fiscaux à l’étranger? Le plus incroyable, toutefois, c’est que le gouvernement du Canada n’a absolument aucune idée des recettes qu’il devrait percevoir : l’évasion fiscale à l’étranger nous fait-elle perdre trois milliards ou trente milliards de dollars? Je ne le sais pas, vous ne le savez pas, et, ce qui est plus important encore, le gouvernement du Canada ne le sait pas.

Dans le but d’essayer de découvrir exactement combien d’argent le trésor public perd en raison de l’évasion fiscale à l’étranger, j’ai présenté un projet de loi au Sénat : Loi sur l’équité pour les contribuables canadiens : Calcul du manque à gagner fiscal pour lutter contre l’évasion fiscale à l’étranger. Essentiellement, ce projet de loi vise à recueillir des données précises pour mesurer la différence entre les recettes bel et bien perçues par le gouvernement du Canada et les recettes qu’il pourrait percevoir, un montant connu sous le nom de « manque à gagner fiscal ».

Le refus de l’Agence du revenu du Canada de mesurer le manque à gagner fiscal s’explique peut‑être en partie par son attitude à l’égard du manque à gagner lui-même : elle n’en comprend tout simplement pas la valeur. Une telle analyse du manque à gagner fiscal dévoilerait les sommes que les fraudeurs du fisc à l’étranger doivent au gouvernement canadien, un montant dont les Canadiens seraient assurément stupéfaits et qui pourrait mettre davantage en lumière les ratés de l’Agence dans la lutte contre l’évasion fiscale à l’étranger.

L’Agence du revenu du Canada est l’une des rares administrations fiscales à adopter une attitude aussi désinvolte en ce qui concerne le calcul du manque à gagner fiscal. Les États-Unis, le Royaume‑Uni, le Danemark, la France, la Belgique, la Slovénie, le Mexique, le Luxembourg, Israël, l’Estonie, la Turquie : tous ces pays produisent régulièrement des estimations de leur manque à gagner fiscal, afin de, comme l’indique l’International Revenue Service des États-Unis « prendre de meilleures décisions concernant la politique fiscale et l’affectation des ressources pour l’administration fiscale ». Une telle attitude a même été adoptée par l’État de la Californie, qui évalue son manque à gagner fiscal à environ 10 milliards de dollars américains.

Il ne s’agit pas d’une entreprise que les administrations prennent à la légère. Her Majesty’s Revenue and Customs (HMRC), l’équivalent de l’ARC au Royaume-Uni (R.‑U.), produit des évaluations annuelles de son manque à gagner fiscal; l’administration considère que ce travail d’évaluation « sert de fondement à la stratégie du HMRC » et lui permet de mesurer l’efficacité de ses programmes. En fait, le HMRC examine même les évaluations que font d’autres pays de leur propre manque à gagner fiscal, à l’affût de politiques intéressantes que le R.‑U. pourrait adopter. De même, l’administration fiscale nationale de la Suède utilise ses évaluations du manque à gagner fiscal comme méthode de gestion du risque, afin de déterminer la meilleure façon de répartir ses ressources fiscales.

Pourtant, le Canada refuse encore de mesurer son manque à gagner fiscal.

Le projet de loi S-226 obligerait l’Agence du revenu du Canada à produire un rapport public comprenant toutes les condamnations pour évasion fiscale à l’étranger; à les compiler dans un rapport unique pour montrer aux Canadiens les conséquences pour les fraudeurs qui cachent leur argent dans des paradis fiscaux, et pour démontrer à quel point le gouvernement prend au sérieux la question de l’évasion fiscale à l’étranger.

Les Canadiens se préoccupent également de la différence de traitement entre l’évasion fiscale au Canada et l’évasion fiscale à l’étranger. L’ARC fait un excellent travail pour ce qui est d’attraper et de punir les Canadiens qui conservent leur argent et leurs revenus au Canada et tentent d’échapper à l’impôt. En consultant le site Web de l’ARC, on constate qu’il y a toutes sortes de condamnations pour évasion fiscale au Canada : un agent immobilier en Colombie‑Britannique, un peintre en bâtiment au Nouveau-Brunswick, un médecin en Saskatchewan. Cependant, aucune condamnation pour évasion fiscale à l’étranger ne figure dans la liste.

Ce projet de loi porte sur le droit des Canadiens de savoir que leur régime fiscal est équitable et administré équitablement. Cette équité – et la confiance dans cette équité – doivent constituer la pierre angulaire des politiques du gouvernement, et de ses lois en particulier. Comme en toutes choses, la justice de notre régime fiscal doit être apparente et réelle. Par ce projet de loi, on souhaite doter ce régime de la transparence dont il a grandement besoin, afin que les Canadiens puissent eux-mêmes juger si les résultats sont à la hauteur des discours.

Il y a manifestement un grave problème à l’Agence du revenu du Canada et nous avons le devoir de veiller à ce que les Canadiens qui paient leurs impôts et respectent les lois soient traités comme tous les autres Canadiens. On ne peut plus tolérer ce traitement discriminatoire qui permet à certains Canadiens de mettre leur argent à l’abri du fisc à l’étranger, alors que les autres comblent le manque à gagner.

 

Percy Downe est sénateur pour Charlottetown.

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