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Troisième lecture du projet de loi C-45, Projet de loi sur le cannabis (débat sur l’amendement du sénateur Tannas)

Troisième lecture du projet de loi C-45, Projet de loi sur le cannabis (débat sur l’amendement du sénateur Tannas)

Troisième lecture du projet de loi C-45, Projet de loi sur le cannabis (débat sur l’amendement du sénateur Tannas)

L’honorable Lillian Eva Dyck : 

Merci, sénateur Tannas. Nous avons étudié la question des permis en comité et tout ce que vous avez dit est, bien sûr, vrai et exact. Nous avons entamé des discussions à ce sujet avec les ministres. Selon ce que nous avons cru comprendre, le service d’accompagnement, comme vous l’avez indiqué, serait loin d’être suffisant pour accomplir la tâche envisagée par notre comité. On nous a dit que les formulaires sont assez compliqués, mais qu’on aura besoin de bien plus que d’un service d’accompagnement pour garantir qu’une proportion importante de ces permis soit octroyée à des organisations des Premières Nations.

Une chose que les ministres ont précisée est qu’ils ne savent pas comment on en arrivera au 20 p. 100, car on ne connaît pas le nombre de permis qui seront octroyés. Il n’y a pas de plafond quant au nombre de permis. Je ne suis pas entrepreneure — je suis neurochimiste de formation —, mais j’imagine que, au fur et à mesure que le commerce se développe, évidemment, plus de personnes vont s’y adonner, alors il y aura toujours de plus en plus de demandes, et de plus en plus de permis seront octroyés. J’imagine qu’ils ont essayé de dire qu’ils ne pouvaient mettre en pratique le chiffre de 20 p. 100.

Je ne peux pas vous poser une question, mais peut-être que quelqu’un d’autre pourrait en dire un peu plus sur le sujet. Je me demande comment nous pouvons appliquer une telle mesure lorsque nous ne savons pas quel sera le nombre total. Comment pouvons-nous réserver 20 p. 100 des licences et permis sans savoir exactement combien il y en aura?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Tannas, vous allez devoir lui poser une question.

Le sénateur Tannas : Je le ferai, si elle accepte de répondre à une question. Saviez-vous, sénatrice Dyck, que cette question a été soulevée au Comité des affaires sociales? Nous avons alors entendu l’objection suivante : « Comment pouvons-nous réserver 20 p. 100 d’un nombre infini? »

Je me demande si vous êtes au courant d’un certain nombre de choses. En ce moment, un groupe relativement petit d’entreprises détient l’ensemble des permis; il est probable que la production manufacturière, comme dans le cas de l’alcool, de la bière et des cigarettes, se concentrera chez un nombre relativement petit de joueurs; ces entreprises auraient la responsabilité de veiller à ce qu’elles implantent une installation sur cinq dans une communauté autochtone ou sur une terre détenue par des gouvernements autochtones. Le saviez-vous?

La sénatrice Dyck : Merci de la question. Vous me rafraîchissez la mémoire. Je devrais probablement relire les transcriptions. Je pense que vous avez répondu à la question en grande partie.

J’ai presque une impression de déjà-vu. Je vous ai probablement déjà posé la question au comité. Vous dites qu’il y aura, par exemple, 5 ou 10 grandes sociétés. Si tout revient à ces 5 ou 10 joueurs, il faudra les identifier rapidement, parce que les premières personnes à demander et à obtenir des permis auront plus de chances de réussir. C’est ce que j’en comprends.

Le sénateur Tannas : Sénatrice Dyck, dans la lettre qui a été envoyée aujourd’hui, je pense qu’il est question d’un certain nombre de demandes en cours qui ont été présentées par des Autochtones et par des groupes affiliés. Les témoins ont aussi dit au Comité des affaires sociales que Santé Canada a bel et bien le pouvoir d’accorder la priorité à certaines demandes plutôt qu’à d’autres.

Dans cette optique, n’y aurait-il pas, selon vous, une manière de bien gérer ce processus?

La sénatrice Dyck : Oui, je comprends votre logique. Elle me semble raisonnable.

Selon l’amendement, la demande serait donc adressée au ministre de la Santé. L’amendement parle du « ministre ». Dans le projet de loi, c’est du ministre de la Santé qu’il est question? D’accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Woo, voulez-vous poser une question?

L’honorable Yuen Pau Woo : Oui. Sénatrice Dyck, acceptez-vous de répondre à une question?

La sénatrice Dyck : Oui.

Le sénateur Woo : Outre le fait évident qu’il soit impossible de dire à quoi correspond 20 p. 100 d’un nombre infini — personne ne peut répondre à cette question —, pourriez-vous nous dire ce que vous pensez du libellé très étrange de l’amendement, selon lequel il devrait y avoir au moins 20 p. 100 des licences et des permis, et ce, non pas au cours une certaine période, mais en tout temps?

Cet objectif poserait certaines difficultés, selon moi. Il se pourrait que, à un moment précis, le pourcentage soit inférieur à 20 p. 100. Les organismes qui délivrent les licences auraient alors la difficile tâche de rajuster la répartition des licences afin, tout d’abord, que les organismes autochtones puissent exercer leur droit légitime de participer à l’industrie, sans oublier, bien sûr, les entreprises non autochtones qui pourraient être intéressées.

La sénatrice Dyck : Merci. La formulation proposée pourrait poser problème, puisque tout dépendrait des organismes qui présentent des demandes. Imaginez que, pendant une certaine période, aucun des demandeurs ne soit autochtone ou n’ait de partenaires autochtones. Que ferez-vous alors? Comment pourrez-vous satisfaire aux exigences prévues dans l’amendement?

L’honorable Ratna Omidvar : L’honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question?

La sénatrice Dyck : Oui.

La sénatrice Omidvar : Je crois fermement que, lorsqu’un un climat d’exclusion ancré dans l’histoire comme celui dont il est question subsiste, il faut avoir recours à des mécanismes créatifs de sociologie appliquée. C’est un point que j’ai déjà fait valoir en cette enceinte.

Je comprends très bien le but visé, qui pourrait marquer un tournant décisif. Je me questionne toutefois à propos de l’emploi d’un quota fixe plutôt que d’un objectif. Lorsqu’on établit un objectif, on peut le surveiller, le mesurer, le déposer et le réévaluer. Un objectif permet d’aller plus loin et peut être intégré à la réglementation. Qu’en pensez-vous, sénatrice Dyck?

La sénatrice Dyck : Fait intéressant, la lettre laisse entendre qu’il y aurait un suivi et une surveillance, mais aucun pourcentage n’est spécifié. Notre comité, qui assurera le suivi, parle d’un pourcentage de 20 p. 100. Comme il a la responsabilité d’assurer le suivi, nous pourrions insister sur ce chiffre de 20 p. 100 lorsque les ministres nous reviendront. Les choses se dirigent dans cette direction; ce n’est pas vraiment un amendement, mais l’intention y est.

L’honorable Leo Housakos : Sénatrice Dyck, pour revenir aux propos de la sénatrice Stewart Olsen, qui parle d’avoir le gros bout du bâton, ne serait-il pas préférable pour Santé Canada et le gouvernement d’établir des directives claires et de fixer un pourcentage précis de 20 p. 100, plutôt que de s’en tenir à une suggestion?

L’amendement du sénateur Tannas permet d’indiquer carrément aux intervenants ce qui doit être accompli dans les communautés autochtones.

La sénatrice Dyck : Il est, en effet, très utile de fixer un chiffre. Certains pourraient soutenir qu’il est injuste et qu’il nous a été dicté par des témoins. On pourrait faire valoir que nous devrions tenter de compenser la sous-représentation historique des Autochtones dans le milieu des affaires.

D’après moi, c’est comme s’il fallait faire rapport et exercer une surveillance en plus d’imposer cette cible. Puisque nous venons tout juste de recevoir la lettre, il nous faudra quelques instants pour décider de la voie à suivre.